J'ai un aveu à te faire. Quand tu me demandes de te coacher pour "améliorer ta discipline", je raidi un petit peu à l'intérieur. Avec tout mon respect, dans mon élan premier, j'aurais envie de te dire: Fuck la discipline!
Ce n'est pas que je n'y crois pas. Enfin, je ne sais plus. Je suis moi-même plutôt disciplinée. J'ai grandi dans le milieu du sport d'élite alors j'ai intégré ce que la pratique requiert d'assiduité et de répétition, notions que j'associerais à la discipline. De plus, si je suis travailleuse autonome à présent, je dois vraisemblablement démontrer suffisamment de discipline...
Hhm. Il y a du flou entourant le concept. En quoi ne suis-je pas en paix avec la discipline? Qu'est-ce qui me déclenche tant? Ce n'est pas tout à fait clair. Et puisque je suis engagée à m'observer dans mes angles morts et mes réactions afin de te servir au mieux en tant que coach, de toute évidence, je dois clarifier ce qui se joue ici en moi.
J'explore donc. Point de départ: wikipédia.
La discipline fait référence au comportement suivant les règles, à la réglementation, à l'ordre, au contrôle et à l'autorité. Il peut également faire référence à une punition. La discipline est utilisée pour créer des habitudes, des routines et des mécanismes automatiques tels que l'obéissance aveugle.
Voilà! Je comprends pourquoi je trouve ça si louche: ce qui me fait mal en dedans quand je t'écoute, c'est que tu sembles associer la discipline à cette contrainte, à cette lourdeur, à cet étouffement, à cette soumission.
Je me trompe? (C'est possible!)
Yeah! Then... Fuck la discipline! Je ne t'aiderai pas à te faire violence ainsi. Je ne perpétuerai pas l'oppression, la castration de ton élan de vie! Je refuse de reconduire l'injonction d'un ordre et d'une autorité qui n'aurait pas démontré sa légitimité.
Qui donc nous a enseigné que la discipline devait être si restrictive, répressive, voire punitive ?
Avec cette définition, si ton âme est éprise de liberté comme la mienne, ça ne m'étonne pas que tu t'auto-sabotes ! Et je préférerais ne pas contribuer à ce cercle vicieux que tu nourris... sur fond de culpabilité.
Fuck la discipline! (Dis-le avec moi! Ça fait tant de bien!)
Je suis à la recherche de voies alternatives, non-violentes, pérennes, écologiques vers la réalisation de tes objectifs véritables. Car reconnaissons-le: ton vrai but, ce n'est pas la discipline. Ce n'est qu'un moyen, une stratégie envisagée. Mais s'il y avait d'autres options possibles pour t'épanouir et de réaliser, choisirais-tu cette forme étouffante de discipline? Et si je t'offrais plutôt ... une Permission - avec un grand P - d'être pleinement qui tu es ? Et si tout était déjà là, et que tu étais déjà en paix, consciente de ta perfection? Chercherais-tu autant à "améliorer ta discipline"?
J'ai un nouvel aveu pour toi: Je suis convaincue que ton oeuvre existe déjà dans l’éternité du moment présent; qu'elle existe à même ton cœur qui bât. Et ton cœur, il bât... sans nul besoin de discipline.
Tel que je le vois, le coaching est un accompagnement à la naissance. Et à ce que je sache, la maïeutique n'a rien à voir avec la discipline. (Quoique... les contractions...)
Discipline et pouvoir
Selon la définition ci-haut, donc, discipline rimerait avec obéissance et contrôle, dans le but de créer des habitudes.
Alors reprenons si tu le permets la question posée plus haut: D’où provient cette idée que discipline équivaut à violence ? Qui nous a enseigné cela ? Et pour quelles habitudes ?
Ma (dé)formation en philosophie politique me mène à soupçonner des siècles et des siècles d'oppression politico-religieuse.
A parte. (Quoique tout soit interrelié.)
Je pourrais tout aussi bien développer du côté de la psychanalyse, et approfondir les fonctions et mécanismes du Surmoi ("L'une des trois instances de la personnalité (selon Freud), agissant sur le moi comme moyen de défense contre les pulsions, et qui se développe à partir des interdits parentaux.").
Ou je pourrais élaborer sur ce que les neurosciences nous permettent de comprendre du rapport entre le néocortex et les autres parties de l'appareil neurologique.
Mais ce qui me passionne, c'est qu'il semble y avoir des parallèles ahurissants entre la psyché d'un individu... et la psyché collective. C'est comme si les deux étaient analogues; comme si on retrouvait dans l'évolution de la conscience collective les mêmes jalons que ceux d’une personne dans son processus de maturation et d'individuation.
Ainsi, par exemple, le principe disciplinant est au départ externe : un parent pour l'enfant, un chef politique pour le collectif. Dans les deux cas, c'est un principe qui vise la maîtrise des pulsions instinctuelles au profit de la socialisation. (La maîtrise du moment présent au profit de ce qu'on construit dans le temps ?)
Or la dynamique évolue... et le locus de l'autorité aussi. La discipline est une principe qu'il importe certes d'intérioriser... Mais peut-être pas en n'importe quelle forme. Et c'est un peu ce que j'ai envie de réfléchir ici. Je te propose donc ce petit détour dans l'histoire politique afin d'ouvrir nos perspectives sur "l'avenir de la discipline"...
Souveraineté et pouvoir : Le politique
Pour être bien claire, voici d'abord ma définition du pouvoir. Le pouvoir, c'est simplement la capacité d'agir. C'est une force produisant une réaction, un mouvement ou un changement. Ce n'est en soi aucunement péjoratif. Notons toutefois que le pouvoir sera inextricablement relationnel, car il y a nécessairement un sujet qui agit sur un object. Néanmoins, politiquement parlant, il y a une distinction entre le "Pouvoir-sur", qui domine de façon hiérarchique, et le "Pouvoir-avec", qui collabore pour agir (mais nécessairement "sur" quelque chose).
Au fil de l'évolution de notre espèce, l'organisation sociale du pouvoir a prit diverses formes, formelles et informelles. Je ne vais pas détailler ce portrait ici. Je me contenterai de souligner que l'État moderne, de droit libéral, n'a prit forme que très lentement dans la pensée occidentale. Il n'y a pas si longtemps encore, en 1655, le roi Louis XIV clamait "L'État, c'est moi!" La dépersonnalisation du pouvoir politique n'est donc que très récente sur l'échelle des 200 000 années d'existence de notre espèce Sapiens Sapiens!
À ce jour, l'État se positionne en gardien de l'ordre social. Il se dit souverain : en théorie, nul n'est au-dessus de ses lois. L'État détient l'ultime pouvoir-sur, puisqu'il s'est octroyé l'exclusive légitimité d'user de la violence et de la coercion - via l'armée, la police, le système pénal - afin de préserver ce qu'il qualifie d'ordre. Sur quiconque enfreint sa loi, les forces de l'ordre imposerons les "mesures disciplinaires."
Prenons toutefois un petit moment pour nous rappeler que les lois sont écrites par l'humain et ne sont pas celle de la Nature. Il importe donc, pas soucis de santé et d'écologie il me semble, de questionner: à qui profitent ces lois ?
Les philosophes anarchistes se sont donné une mission : imaginer l'organisation du pouvoir sans hiérarchie institutionnalisée. Ils et elles ont dénoncé la répression suspecte, très virulente, dont ont été historiquement victimes les contestataires de la souveraineté de l'État. C'est presque comme si le pouvoir-sur, centralisé, ne voulait pas de l'émancipation et de la créativité des masses. Comme s'il ne voulait pas voir s'épanouir l'auto-gestion. Comme s'il avait ses propres visées et que nous devions rester en rangs, collaboratifs, sous peine ... de discipline.
Introjection de la violence
Je me demande donc ... Serait-il possible que, de générations en générations, nous ayons appris, normalisé, et introjecté cette violence du politique autoritaire?
Après tout, honnêtement, on lui envie son autonomie, sa liberté d'action... sa souveraineté. Alors on pourrait effectivement croire (inconsciemment peut-être) qu'il suffit de faire comme le Pouvoir-sur pour nous aussi arriver à nos fins.
Mais se faisant, on dépense beaucoup d'énergie à lutter contre ... les parties libertaires et créatives en nous-même. Elles ont soif d'être entendues et de contribuer à la vision. Elles ont aussi leurs besoins.
Tu t'efforces à l'auto-contrôle. Tu te culpabilises et t'auto-punit quand tu failli. Tu as peur de flancher, de t'auto-saboter. Tant de tensions internes. Cette histoire de discipline, c'est une véritable lutte politique interne entre différentes parties de toi.
Alors revoici la question centrale, celle à la laquelle je suis dévouée : Qu'est-ce qui veut naître par toi ? Quels sont TES véritables objectifs ?
Sont-ils vraiment ceux de l'État libéral ?
À nous qui cherchons si ardemment, si anxieusement à faire la Transition: Pourquoi n'explorerions-nous pas d'autres manières de nous mobiliser envers NOS objectifs ? Pourquoi ne mettrions-nous pas un terme à cette violence disciplinaire?! Et si la discipline trouvait une autre source que celle de la domination?
La voie étymologique
Le mot "discipline" est dérivé du latin discipulus signifiant "disciple", lui même de discere : apprendre.
Apprendre, ça j'aime. Se faire disciple pour apprendre. Ça me paraît déjà moins ennuyeux. Car on n'a jamais fini d'apprendre... Tout comme on ne peut pas ne pas apprendre.
Mais c'est effectivement inconfortable d’apprendre. Tout d'abord, reconnaître qu'on ne sait pas : accepter de se remettre en question. Ça requiert une dose certaine d'humilité.
Puis il y a la confusion, ce passage déstructurant quand on accepte de laisser aller les bouts de certitudes et d'habitudes qui nous sécurisaient … mais qui se révèlent maintenant limitants. Pour faire la mise à jour, on doit accepter la défragmentation du disque dur.
Apprendre est vulnérable. Apprendre requiert de s'en remettre… un peu... pour un temps, à quelque chose de plus grand que ce moment confus. Quelque chose de confiance. Quelque chose pouvant nous contenir dans cet état... chrysalide. Un cadre. Un modèle. Un moule. Un protocole ou une procédure, prévisible, sécurisante.
C’est à ça que sert la discipline : c’est l'échafaudage qui tiendra en place pendant que tu ériges ton œuvre! C’est ce qui t’assurera un minimum d’économie d’énergie; une roue que tu n’auras pas à ré-inventer jour après jour, qui va donner du momentum à ton apprentissage et ton véritable objectif. "La discipline est utilisée pour créer des habitudes, des routines et des mécanismes automatiques..." Wikipédia le disait.
Il s'agit d'un espace, d’un pont entre la volonté et la mémoire. C’est toi en devenir; en connexion avec ton centre, avec ce que sais déjà être. C’est ton cœur qui bât. Ta discipline est intrinsèque. Que tu le veuilles ou non : tu es ta/ ton propre disciple ! Alors sois disciple de ta propre vision créatrice! De ta propre autorité. Et s'il te plaît oui: demeure indiscipliné.e face à quiconque ou à quoi que ce soit ne respectant pas ta pleine valeur. N'obéis à rien d'autre que ta Lumière.
Certes, la discipline est reliée à une capacité à surfer les pulsions, les désirs de gratification immédiates, les distractions. Cela peut-être difficile ou désagréable dans l'instant... mais ça ne le reste pas longtemps quand tu sais POUR QUOI tu fais ce que tu fais.
La discipline peut avoir sa source à ce qui est le plus important pour toi. Elle peut être synonyme de JOIE et de LIBERTÉ.
D'ailleurs … si pour toi la discipline est un défi, je t’offre la question suivante : Dans quelle mesure respectes-tu tes valeurs... ta valeur?
Est-il possible qu’il y ait une corrélation entre estime de soi et discipline? Si c’est le cas, alors utilisons justement ce lien... comme un antidote.
Chaque fois que tu prioriseras de faire ce qui est le plus important pour toi au long terme, tu le verras comme une preuve de ton estime personnelle.
S’en suit un cercle vertueux…
Mais juste au cas où tu en douterais encore: Tu es déjà parfait.e. De ta position unique et par ton expérience, toi seule détient ce petit bout de sagesse dont le collectif a besoin. Nous avons besoin de toi, telle que tu es, pour être un Tout authentique.
Discipline et temporalité
En terminant, prenons enfin le temps d’aborder… le temps.
Les grecs anciens - et bien d’autres cultures sur la Terre - savaient une chose que nous semblons avoir oublié : Il n’y a pas qu’une sorte de temps. Il y a le Chronos : le temps qui passe, linéaire : la durée… Mais il y a aussi le Kaïros : le temps opportun, le timing.
Nous associons généralement la discipline à la routine, à la récurrence, à la régularité, à la répétition... C'est certainement ce qui créer le pattern, la mémoire. Mais attention: le temps n'est pas que linéaire. Le temps, c'est aussi une spirale.
Ouais. (Gentle) fuck à la discipline linéaire… Tu n'as pas à te comparer, à te caser à l’arbitraire calendrier linéaire qui occulte l'existence du cercle, du cycle, de la rythmique. Tu n'es pas une ligne droite. Tu es la Vie : cyclique.
Tu es vagues et marées, lunes et saisons. Tu as tes effervescences et tes hibernations. Tu vis d'invisibles et indicibles phases de gestation, de germination, de floraison, de dissémination. Chaque chose en son temps.
Avec l'intention de réduire la violence et tenant compte de cette perspective ajustée du temps, permettons nous de considérer que la discipline n'a possiblement pas à être si rigide et angoissante. Il n'appartient à personne de juger ton niveau de discipline. Ta fréquence est la tienne.
Peut-être qu'en ne faisant "rien", parfois, tu es en réalité disciple de ton rythme naturel. Peut-être que la discipline, c'est aussi se permettre de respirer normalement: inspire... expire. Engage... dégage. Tu n'es pas coupable de ces besoins de repos et de ressourcement.
Consciente de la nature spiralique du temps, consciente des mouvements de l'éternel retour, de la danse, tu as le droit - et il peut même s'avérer intelligent- d'utiliser le courant, le vent, les marées.. de relâcher par moments les efforts et de te fier à la/ta Nature...renouvelables.
Le tout en gardant sur ton radar ton objectif, ton cap, ton oeuvre en devenir.
Je crois que le monde a grand besoin de cette sagesse du non-faire (wu wei, dans la philosophie taoïste), de l'être dans son essence, du yin. C'est une question de santé, d'écologie, l'équilibre. Apprendre à devenir ... à partir, non pas des injonctions du systèmes capitaliste et de l'État libéral qui le protège, mais de ce que notre Sagesse profonde, celle de la Source, nous chuchote:
"Je te vois, disciple de la Vie qui veut vivre."
Révolution responsabilisation
À l'ère du développement personnel, nous sommes un nombre croissant à reconnaître que la liberté et la responsabilité (qui se distingue de la culpabilité) ne font qu'un.
Nous comprenons mieux aujourd'hui la psychologie humaine. Nous comprenons mieux la notion de besoins; nous acceptons lentement mais sûrement à quel point ils sont légitime. Les besoins, qu'on se veuillent ou non, c'est la Vie qui veut vivre. Nous sommes en train de découvrir toute la sagesse contenue dans le mouvement de nos émotions, de notre corps. Nous apprenons à observer et à prendre du recul vis-à-vis nos zones de réactivité (et de réactionnisme) : ce sont nos réflexes de peurs.
Nous ré-apprenons donc l'amour, le respect, le soin de soi. Nous avons davantage d'outils pour cela. Nous avons encore besoin d'espace et de permission. (Ce sont certains des éléments que j'offre par le coaching.) Dans nos dynamiques relationnelles et communicationnelles (qui sont rapellons-nous des lieux de pouvoir), nous prenons de mieux en mieux responsabilité. Nous apprenons à répondre, en conscience.
C'est un travail ardu, complexe, souvent paradoxal. Nous ne sommes pas exempt.es de deuils. Néanmoins, chaque prise de responsabilité est une petit révolution : nous manifestons la possibilité d'un grand Pouvoir-
avec!
Ce qui était requis?
Peut-être qu'avant - historiquement, collectivement, individuellement - nous n'étions simplement, naturellement pas encore assez matures. Peut-être que nous n'avions découvert ni notre valeur intrinsèque, ni notre pouvoir, ni notre mission commune. Peut-être que nous n'avions pas encore atteint le stade de développement nécessaire à l'autogestion. Ou devrais-je dire "le stade nécessaire du développement de l'autogestion" ?!
Le "Pouvoir-sur" aura peut-être contribué, par excès d'exploitation et d'oppression, à une prise de conscience de notre propre sagesse, de notre propre responsabilité. Tel un père bien intentionné, par ses ordre et ses lois, il nous aura protégé de notre immaturité le temps que nous puissions nous dévoiler notre propre pouvoir... qui se différencie du sien.
L'histoire est bien faite.
C'est enthousiasmant.
Je récapitule
Qui donc nous a enseigné que la discipline devait être restrictive, répressive, voire punitive ? (Et engendrer culpabilité, peur, etc.) À qui profitent cette définition? Ce Pouvoir-sur? Ces lois et injonctions?
Serait-ce possible que, de générations en générations, nous ayons appris, normalisé, et introjecté l'autoritarisme du système politique?
Et si au lieu de la discipline-violence tu avais plutôt ... la Permission d'être pleinement qui tu es, avec TA vision, TES valeurs, TES objectifs ?
Puisque ce ces derniers ne sont pas alignés avec ceux de l'État moderne, pourquoi reproduire les moyens que celui-ci utilise ? Comment espérer accéder à l'écologie, à la santé, à la liberté, en répétant des stratégies et schémas de violence?
Pourquoi ne construirions-nous pas des structures d'apprentissage... non-violentes ?! Et si nous devenions les disciples de notre propre autorité, elle même légitimée par la richesse et l'écologie de notre vision ...
Devenons les disciples de NOTRE demain.
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J'ai envie de conversation et de co-création! Tu as des commentaires, des questions suite à ces réflexions? Écris-moi ! evebrierecoaching@gmail.com
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